L’écrivain malien Intagrist El Ansari vient de réaliser une véritable prouesse avec son livre « Écho saharien, L’inconsolable nostalgie ». En effet, chose non courante, il a réussi à condenser toute la beauté, la richesse et le visage méconnu du désert dans son récit. Pour ce faire, il s’est appuyé non sur la théorie mais sur des faits empiriques à travers le périple qu’il a effectué en reliant Paris à Tombouctou, la ville du désert. C’est un rush riche d’enseignements qu’il nous offre à travers son retour dans cet immense étendue de douze millions de km2, le Sahara, après plus d’une décennie passée à Paris.
Voyager c’est connaître, se connaître un peu plus
C’est vrai que la thématique du retour au pays natal a de tout temps attiré les poètes, les écrivains, les conteurs, et Intagrist El Ansari n’y a pas échappé. « Cette nostalgie, je vous dis, ne s’éteint pas ». Si, pour Sylvain Tesson, marcher c’est « aller à l’essentiel », pour l’auteur, l’appel du désert qui est aussi envoûtant qu’irrésistible est une marche indispensable vers quelque part afin « d’être libre et exorciser l’existence de ce monde ». L’œuvre atteste qu’il y a souvent en l’homme une quête de la solitude et la nostalgie des origines.
Corps parfaitement dessiné par la main de Dieu
A travers cette navigation terrestre, dans cette aridité, se trouve le réconfort dans ces montagnes, temples des génies et des secrets du monde, bien gardés. Mais au-delà des bienfaits sur notre esprit de cette étendue sans fin, alors que l’on pensait qu’elles se trouvaient au Venezuela avec ses Miss Univers, le lecteur découvre que le désert est le lieu de résidence des plus belles femmes du monde. Dans ce carnet de route, arrivé à Tamanrasset, il est écrit avec force : « Je n’ai jamais vu autant de Grâce et de beauté ». Jean-Marie Le Clézio avait donc raison d’affirmer : « Sans elles, les hommes auraient été effacés par le sable », au sujet des femmes sahariennes !
Contrairement aux habitudes dans nos villes, au désert, c’est le temps qui tisse les liens, on ne se précipite pas pour parler. Les oasis, oueds, plaines qui ressemblent aux steppes de Mongolie et autres ergs dunaires sont quotidiennement visités par les couchers de soleil parmi les plus beaux du monde. Et le récit du Malien permet de mettre en évidence les particularités des villes comme Kidal ou Ménaka traversées par les caravaniers et les aventuriers. Le Sahel et le Sahara sont également les lieux de campement de nombreuses tribus touaregs comme celle des Kel Ansar dont l’un des illustres ancêtres demeure le grand voyageur Mohamed El Moctar.
L’homme n’existe que par le voyage qu’il accomplit
L’auteur s’interroge : « Dans ce monde…les nouvelles ne sont pas réjouissantes, toujours aussi alarmantes. On se demande bien à quoi bon et à quoi tout cela tient-il vraiment…Je m’interroge parfois sur ce que deviendraient ces nomades dans cette complexité mondiale que nous vivons à l’heure d’internet ? » La plume d’El Ansari nous apprend qu’il aura également emprunté les pas de l’aventurier tangérois Ibn Battûta qui fut le premier explorateur qui passa par Tombouctou près de cinq siècles avant René Caillé. Battûta avait « un désir de voyage, une soif de connaissance et une quête mystique dans sa démarche aventureuse ».
En définitive, comme l’écrivain de la liberté Ibrahim Al-Koni, l’auteur considère que le désert est un enfer de bonne volonté, parce qu’il est justement celui de la liberté. Ce livre est une remarquable quête intérieure qui ne saurait échapper à aucun d’entre nous durant sa vie.
Franck CANA
« Écho saharien, L’inconsolable nostalgie », d’Intagrist El Ansari, récit, éditions Langlois Cécile, Paris, 202 pages, 17 euros.
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