On entend par conscientisation le fait d’éveiller les consciences humaines en vue de la prise en compte d’une carence, d’un devoir, d’un mal, d’une réalité, d’un objectif à atteindre…C’est une méthode pédagogique par laquelle le porteur du message qui édifie prend comme support la réalité historique, matérielle ou sociale. Cela, de manière à mieux impliquer les publics concernés.
Aujourd’hui, 50 ans après les indépendances, le retard accumulé par le continent africain par rapport aux autres est immense. Selon la banque mondiale, l’Afrique représente 10% de la population mondiale, mais 30% des pauvres y vivent. En outre, les 23 pays les plus pauvres au monde en termes de développement humain sont tous africains. Et, en ce début du XXIème siècle, l’Afrique est toujours administrativement pauvre alors qu’elle est le continent le plus riche au monde en ressources naturelles. Comme si cela ne suffisait pas, dans de nombreux pays, les populations sont animées d’un incivisme rare. L’entretien des biens collectifs laisse à désirer et les réflexes vont davantage dans le sens de la destruction des biens de la nation.
Pourquoi ce manque persistant de patriotisme ?
D’aucuns se demandent d’ailleurs s’il n’existerait pas, à y voir de près, une certaine culture africaine de l’incivisme, du non-respect des règles établies. Dans son ouvrage « Et si l’Afrique refusait le développement ? » la Camerounaise Axelle Kabou, recherchant les causes des malheurs de l’Afrique, fait état d’une certaine résistance des Africains au changement. Pour sa part, l’écrivain malien Moussa Konaté, dans son livre « L’Afrique noire est-elle maudite ? », avait mis l’accent sur le poids écrasant des traditions en pointant la part des responsabilités des populations africaines dans les comportements rétrogrades.
L’éveil patriotique de la jeunesse
Partant de là, il y a lieu que des hommes et des femmes organisés s’impliquent fondamentalement afin de renverser la tendance de l’inconscience individuelle ou collective qui cause à ce jour du tort à nos Etats. Pour ce faire, il serait préférable que cet éveil des consciences se fasse par la pédagogie d’une part, mais ensuite à travers des efforts permettant de résoudre les problèmes liés aux besoins humains fondamentaux. C’est-à-dire que les actions éducatives, les échanges avec les différentes populations, jeunes et adultes en priorité, doivent être accompagnés de la création d’emploi, d’une assistance sanitaire, de facilités pouvant permettre à quiconque de créer son propre revenu ou d’une recherche de solution à des problèmes matériels.
Exemple : Prenons le cas d’un jeune ou de plusieurs jeunes qui ont l’habitude de dérober les tables-bancs de l’école du quartier pour en faire du bois de chauffe. Ils méritent d’être conscientisés. Mais, une fois la moralisation terminée, ces jeunes s’attendent à ce qu’on leur apporte une solution pouvant leur permettre de ne plus avoir besoin des tables-bancs de l’école pour couvrir leurs nécessités. C’est pourquoi, ceux qui voudraient agir se doivent d’être présents sur les deux volets qui composent l’éveil des consciences. A défaut de cela, il sera difficile d’atteindre les objectifs de départ.
La conscientisation en milieu professionnel
L’éveil des consciences ne concerne pas seulement les écoliers ou étudiants mais également le monde du travail. En effet, bon nombre de comportements des travailleurs dans les pays africains nuisent à l’individu, à la famille, aux communes, aux régions ou encore à l’Etat. Parmi ceux-ci, on peut citer : l’absentéisme, le vol du matériel professionnel, les détournements de fonds, la négligence professionnelle, la corruption, le favoritisme, la dégradation de l’outil de travail, l’indiscipline, les passe-droits, l’impunité.
Ceux qui sont cités dans la rubrique de l’absentéisme, par exemple, volent leurs employeurs, en l’occurrence l’Etat ou l’entrepreneur privé. Cela représente à la fin de l’année un important manque à gagner. Il est donc impérieux de rappeler les bases du contrat professionnel à tous les publics rencontrés. Aujourd’hui encore, la corruption, qui est un mal endémique en Afrique, contribue au ralentissement du développement. Elle se traduit au quotidien par un manque de soins de santé primaires et secondaires, une pénurie de carburant, un manque d’électricité, d’eau potable, d’enseignants, de routes, d’écoles, d’hôpitaux, de parcs de loisirs, de bourses estudiantines, de manuels scolaires et académiques, de soldes de retraites, de salaires décents, un endettement excessif…
Selon le FMI, la corruption est un fléau planétaire qui mine sérieusement l’Afrique à hauteur de 150 à 200 milliards de dollars par an. Dans les services publics, les pertes de distribution et l’insuffisance des recouvrements pratiqués de connivence avec les usagers font perdre 5,7 milliards de dollars à l’Afrique tous les ans. Et la corruption douanière ou portuaire augmente le coût de la vie de 10% à 30% d’un endroit à un autre. C’est pourquoi, il ne saurait y avoir de bonne gouvernance sans un nouvel élan patriotique dans de nombreux pays. Et, en ce sens, des initiatives encourageantes sont plus que jamais les bienvenues.
Une chose est sûre, un dialogue pédagogique avec des fonctionnaires, par exemple, est aussi appelé à énoncer les vertus liées au travail telles que la conscience professionnelle. Mais encore, il devra également mettre en avant les sanctions administratives prévues aux différents règlements administratifs et rappeler éventuellement la loi. De même, les pouvoirs publics seront encouragés, de manière raisonnée, à mettre en application les textes disciplinaires.
La moralisation des cadres
Il serait improductif d’organiser des réunions ou événements pédagogiques en direction de la population si les dirigeants eux-mêmes, à quelque niveau que ce soit, ne sont pas exemplaires dans leurs actes et paroles.
Pour conclure
Entre l’absence de considération pour la chose publique, l’insouciance constatée dans la dégradation de l’environnement, le bruit et la fureur ou encore l’incivisme qui prospère à l’instar des passe-droits, une grande responsabilité nous incombe. En ce sens qu’il semble parfois que l’on se complaise dans les incivilités. Or, il nous faut vulgariser avant tout la prise de conscience du danger qui nous guette. C’est la clef du changement de l’Afrique et un chantier qui ne saurait échapper à notre génération.
Par conséquent, nous devons en être les fers de lance pour garantir à la génération suivante une existence meilleure. Pour y parvenir, l’idéal serait de vulgariser les bonnes intentions et poser les actions concrètes éloignées de la propagande, du mensonge et du néant.
Franck CANA
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